Deuxième conférence de M.A. Waggewer

Rédigé par André Cabaret - - Aucun commentaire

Conférence du professeur Marc-Antoine Weggewer

Bonjour. Pour celles et ceux qui me me connaîtraient pas, je me présente : Marc-Antoine Weggewer, enseignant-chercheur à l’ECPM, l’École européenne de chimie, polymères et matériaux de Strasbourg. J’ai par ailleurs l’insigne honneur d’être l’époux de Clotilda, capitaine de police à l’Hôtel de Police de Strasbourg.

J’ai beau être enseignant-chercheur spécialiste des polymères, il m’est tout de même possible de discuter d’autre chose que des réactions chimiques et de l’architecture macromoléculaire.

Aujourd’hui nous allons traiter d’un sujet épineux : « les paradoxes de l’emploi des genres grammaticaux dans le discours courant ».

On sait qu’il règne dans la langue française un sexisme ordinaire et omniprésent que nous véhiculons bien malgré nous à chaque fois que nous nous exprimons. Passons rapidement sur l’intolérable affirmation que « le masculin l’emporte sur le féminin » dans l’accord des adjectifs et des participes. C’était une formule à l’emporte-pièce (et pour le moins maladroite) destinée à aider les élèves à mémoriser une règle de grammaire ; mais elle reposait sur un sexisme inconscient que notre époque a su déceler, juger et condamner. Comment remédier à ce sexisme omniprésent ? L’accord de proximité pourrait facilement être reconnu et retenu sans que cela défigure notre langue. Exemple : un monde où les femmes et les hommes sont égaux vs un monde où les hommes et les femmes sont égales. Dilemme qu’on peur résoudre avec la formule suivante : un monde où les hommes et les femmes, ou les femmes et les hommes, sont à égalité !

Il est indéniable que les grammairiens des siècles passés, à partir du 17e siècle notamment, ont tout mis en œuvre pour éclipser le féminin et donc les femmes de la langue et de la vie publique. Des noms de métiers ont été déféminisés. Disparues les peintresses, les officières, les inventrices et les demanderesses. On a gardé les institutrices, les doctoresses et les avocates, mais de justesse. En revanche, on a systématiquement dévalorisé les noms féminins qui devraient correspondre aux noms masculins. Petit florilège :

Une femme qui a un maître écoute son enseignement. Un homme qui a une maîtresse la saute. Un entraîneur travaille à améliorer les résultats d’une équipe sportive. Une entraîneuse travaille dans un bar interlope.
Un coureur fait du sport. Une coureuse est une saute au paf.
Un expert est un scientifique. Une experte s’y connaît au plumard.
Un professionnel est un mec compétent. Une professionnelle est une pute.
Un homme public est un homme connu. Une femme publique est une pute.
Un courtisan est un flatteur. Une courtisane est une pute.
Un homme de mauvaise vie, ça ne se dit pas. Une femme de mauvaise vie est une pute.
Un gagneur est un performant qui gagne. Une gagneuse est une pute qui rapporte. »

 

C’est tiré d’un bouquin de Davy Borde intitulé Tirons la langue ou Plaidoyer contre le sexisme dans la langue française. On ne peut qu’être d’accord.

Le constat est posé. Comment réparer des grammairiens l’irréparable outrage ?

En reféminisant les professions. Un auteur, une auteure ou une autrice. Monsieur le maire, madame la maire. Et on se bat toujours pour savoir s’il faut préférer madame la maire, la députée, la secrétaire perpétuelle, à madame le maire, le député, le secrétaire perpétuel… Quoi d’autre ? Récemment il s’est avéré qu’on pourrait tout régler grâce à l’écriture inclusive.

Ah, l’écriture inclusive ! Exemples : « Mes cher.e.s ami.e.s, nous sommes habitué.e.s à parler de citoyen.ne.s, mais les Français·es sont divisé·e·s  sur la question ». Qu’est-ce que l’on constate ? Un, que ça ne passe pas du tout à l’oral. (Car ça donne ceci : mé cher ami nous somm zabitué a parlé de sitoïen et de sitoïenn etc., etc.) Deux, que le masculin arrive toujours en primo-position. Trois, qu’à part compliquer les choses ça ne fait pas vraiment avancer le schmilblick ! À ce compte-là, pourquoi ajouter le e du féminin, si on ne sait pas qu’il en est la marque, ni le s du pluriel si on ignore à quoi il sert… ?

On nous rebat les oreilles avec ces histoires de masculin oppressif et de féminin oppressé. Or qu’entend-on à longueur d’antenne, radio et télévision mêlées ? Des insanités énoncées par des gens qui ont prétendument suivi des études : journalistes, politiciens, scientifiques, experts en tous genres, et qui massacrent gaillardement l’accord du féminin pour les adjectifs et les participes. Avec votre permission, je vais les lire à haute voix : c’est plus percutant à l’oreille :

- la première chose que vous avez dit

- les réformes que nous avons entrepris

- toutes les décisions qu’on a pris ensemble

- il faut garder les écoles ouverts à tout prix

- l’Allemagne avec lequel qui nous avons des relations privilégiées

- j’ai rencontré des tribus très dangereux

- vos théories avec lequel je suis en désaccord

- une casserole dans lequel on mélange…

- la deuxième chose sur lequel nous sommes d’accord

- elles se sont remis au travail

- il y a les actions qui sont permis et celles qui sont interdits (sic!)

- toutes les directives qui ont été mis en place

- les concurrentes qui ont été pris dans la chute

- la France ne peut pas décider tout seul

- on ne s’attendait pas à une telle réaction de la France et de l’Angleterre : il va falloir s’occuper d’eux sérieusement (!)

- c’est la dernière chose auquel on touchera

- l’académie fournit le sujet sur laquelle on doit discuter…

- tant qu’on peut le faire par divers manières

- etc.

D’un côté, on féminise ; de l’autre côté on masculinise. Ce serait-il pas un effet d’un complot du genre viril par hasard ???

Il est vrai que l’accord du participe passé est d’une difficulté insurmontable. On peut apprendre des langages informatiques complexes, la terminologie juridique, commerciale, financière ou médicale, on s’enfile par cœur le manuel du Rubiks’cube, on se paie le luxe de « parler verlan », de « parler banlieue », de « parler rappeur », de « parler Aya Nakamura », on digère des textos rédigés sans aucune règle ni syntaxe, on se tape de la langue de bois politicienne, de la novlangue woke, du politiquement correct, des éléments de langage, on est capable d’intégrer le code de la route et les spécificités de n’importe quel jargon scientifique, militaire, sportif ou ethnique… mais l’accord du participe ? Ah ça non, trois fois non ! Trop dur ! Trop compliqué ! Trop discriminant ! Alors tant pis pour le pauvre COD placé avant le verbe avoir, il n’a qu’à se mettre ailleurs, et qu’on n’en parle plus… « Lé livr ke jé lu » : ça, c’est du bon français ! Soyons tolérants...

Ce qui n’empêche personne de massacrer bien autre chose que cet accord.

Et l’on n’oubliera pas des tournures telles que :

- une question qui est difficile à répondre

- sait-on pourquoi la pandémie a-t-elle touché tous les pays ?

- elle s’est permise de dire

- le député a été très surprise de s’entendre poser cette question

- le candidat est surprise par ce score (!)

- mais, bien entendu : les institutrices sont surpris par ces comportements… !

- la victime s’est faite agresser, la femme s’est faite violer, elle s’est faite une entorse, on a faite plusieurs erreurs (!!)

- elle aussi elle n’a pas compris ( nous non plus on n’a pas compris…)

- les troupes sont prêtes d’avancer (et pourquoi pas « près à avancer »?)

- et tutti quanti !

 

Sans omettre ce mot éminemment féminin : la personne. Avez-vous remarqué comme ce mot est devenu masculin pour les intervenants sur les ondes ?

- il y avait six personnes dans la salle d’attente ; ils ont attendu patiemment

- on isole les personnes à risque parce qu’ils ont besoin d’être pris en charge

- toutes les personnes contraints de faire un test

- deux personnes serré(e ?)s l’un contre l’autre

- sur deux cents personnes la moitié sont déclarés positifs

- cette personne paraissait très agressif

- toutes ces personnes, ils font comme si de rien n’était

- on fait entrer une personne après l’autre et chacun montre son pass.

- chacun à l’Assemblée prendront ses responsabilités

- j’ai rencontré des personnes qui étaient prêts à travailler en télétravail

- une personne sur cinq ne peut pas suivre la campagne parce qu’ils ne sont pas connectés

- certaines personnes ont déclaré forfait quand ils ont sBonjour. Pour celles et ceux qui me me connaîtraient pas, je me présente : Marc-Antoine Weggewer, enseignant-chercheur à l’ECPM, l’École européenne de chimie, polymères et matériaux de Strasbourg. J’ai par ailleurs l’insigne honneur d’être l’époux de Clotilda, capitaine de police à l’Hôtel de Police de Strasbourg.u que etc.

- dans le stade il y avait 2000 personnes assis…

- il y a énormément de personnes qui sont bons dans ce domaine

- toutes ces personnes attendent qu’on s’occupe d’eux…

- sécuriser les lieux avec des personnes qui sont tous vacciné(e?)s

- beaucoup de personnes craignent qu’on fasse mieux qu’eux !

D’autres mots subissent aussi un transfert de genre :

- je n’ai qu’une ligne directrice, c’est celui qui consiste à….

- du moment où les victimes eux-mêmes le réclament…

- un diplomate affirme avoir eu affaire à des tribus très dangereux… (!)

Noms de profession, même altération :

- on a appelé la police ; ils sont arrivés dix minutes plus tard

- dès que la police est à pied d’œuvre, ils font régner l’ordre

- chaque fois que la police intervient, ils se livrent à des violences inadmissibles

- les populations se détachent de nous parce qu’ils ont le sentiment que etc.

- les écoles doivent rester fermé(e?)s parce qu’ils ne peuvent pas accueillir les personnes atteints par le virus… !

- les aides-soignantes se sont montré(e?)s compréhensifs

- la majorité a été très compréhensif à cet égard...

- l’importance de l’Assemblée nationale : c’est lui qui détient les clés de etc.

- une loi très important pour etc.

- les maîtresses d’école savent qu’on peut compter sur eux en cas de besoin...

- à la frontière il y a deux cent mille forces russes qui sont prêts à intervenir.

- des associations qu’il faut considérer pour ce qu’ils sont

Alors, au vu de ces perles, on peut toujours s’acharner à promouvoir un pronom personnel non genré, style : iel, il n’en restera pas moins difficilement supportable d’entendre qu’une personne pour lequel on a de l’affection a été interdit d’entrée par des vigiles peu compréhensives

D’un côté, les adeptes du féminisme à tout crin ; de l’autre, les je-m’en-foutistes langagiers ! Vous rajoutez par là-dessus un brin de wokisme, une louche de cancel culture, un chouïa de déconstructivisme, une pelletée de progressisme et une flopée d’anti-ismes de tout poil, et vous avez une idée assez claire de ce qu’on n’a plus le doit de ne plus dire ni de plus penser tout en le pensant mais sans le formuler tout en le taisant pour ne pas être accusé d’être un accusateur qui se victimise pour mieux victimiser ceux qui ne s’y reconnaissent pas… À bon entendeur, salut ! Et à bientôt.

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